Les appendicites aiguës présentent un large éventail de tableaux cliniques. Les chirurgiens les plus chevronnés ce sont heurtés de nombreuses fois à des appendicites difficiles voire à des tableaux atypiques. Voici le cas d'une appendicectomie laparoscopique qui nous a amené à une surprenante découverte.

Patient de 42 ans, admis dans le cadre de l’urgence pour syndrome douloureux de la fosse iliaque droite évoluant depuis 24 heures avec hyperleucocytose à 11.000 GB/mm, T° à 38, défense localisée à la fosse iliaque droite. Le diagnostic d’appendicite aiguë est confirmé par l'échographie abdominale devant un élargissement de la base appendiculaire et une adénite mésentérique.
Devant un tel tableau, il est inutile de procéder à d'autres investigations et la décision d'intervention pour appendicite aiguë est prise. La voie d'abord sera cœlioscopique.
Dès l'introduction de l'optique, l'aspect de l'appendice prête à confusion. Celui ci est peu inflammatoire, catarrhale, contrastant avec l'importance des signes cliniques. On décide néanmoins de procéder à l'appendicectomie cœlioscopique qui se passe sans encombres sur un appendice somme toute très coopératif.
On déroule en fin d'intervention, les 50 derniers centimètres de l'iléon à la recherche d'un diverticule de Meckel. Nous notons, à 30 cm de la jonction iléo-cæcale, une déformation importante de la paroi intestinale donnant l'aspect d'une tumeur du grêle. Il s'agit en fait d'une formation endoluminale, mobile sans signes inflammatoires locaux ni d'envahissement régional.
Devant ce tableau atypique, on procède à une coelioconversion par une incision transverse sus ombilicale prolongeant l'orifice du trocart ombilical.

Ouverture de l'iléon par une incision longitudinale. Il s'agit d'un phytobézoard de 5 cm de grand axe. Fermeture transversale par des points séparés de vicryl 3/0 et réintégration abdominale.
Les suites post opératoires sont simples. Le patient est sortant à J3 post opératoire
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Les bézoards sont une cause rare d'occlusion intestinale, ils représentent 1 à 5.8% des patients opérés. Ce sont des corps étrangers organiques du tractus digestif constitués de concrétions de substances accumulées dans ce dernier. On distingue deux variétés principales :
- Les phytobézoards les plus fréquents (80%), secondaires à une alimentation riche en fibres végétales
- Les trichobézoards dus à l'accumulation de cheveux dans l'estomac dans un contexte de trichotillomanie, associés à une alopécie et se voient surtout chez les sujets jeunes parfois dans un contexte psychiatrique (syndrome de Rapunzel)
- D'autres sont plus rares : lactobézoards (produits laitiers), pharmacobézoards (anti-acides)
Cette affection peut rester longtemps asymptomatique. Les tableaux cliniques sont variés et manquent de spécificités : douleur abdominale, nausées, vomissement, constipation, parfois perception d'une masse épigastrique lorsque le bézoard est de siège gastrique. Il peut être révélé par un tableau aiguë : hémorragie digestive, occlusion intestinale, pancréatite aiguë ou une perforation digestive.
Le traitement repose sur l'extraction du bézoard par voie endoscopique au décours d'une FOGD lorsque celui est gastro duodénal ou par voie chirurgicale, le plus souvent.
Le tableau clinique de notre patient comparable à celui d'une appendicite aiguë est dû à la migration du volumineux phytobézoard de 5 cm de diamètre et son arrêt au niveau de la valvule de Bauhin.
Il ne faut donc pas hésiter à dérouler le grêle en fin d'intervention lorsque l’appendice semble sain.
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